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Armes d’aujourd’hui – Ep1 : les munitions guidées

Publié le 3 juillet 2022 ...

#Comprendre #Sécurité

Premier article d’une série dédiée aux armes de guerre d’aujourd’hui, « Les MUNITIONS GUIDÉES ». Son but est de vous expliquer dans une langue simple ce que sont les cartouches et autres obus actuels. Apprêtez-vous à découvrir un autre monde, mais sans emprunter le jargon des spécialistes.

Fut une époque où les munitions glissées dans des armes de poing, ou dans un canon faisaient mouche parce que ceux qui manipulaient ces armes voyaient plus ou moins distinctement leur cible. On visait celle-ci parce qu’on la voyait dans le prolongement du canon de son pistolet, de sa mitraillette ou de sa mitrailleuse. Pour ce qui est des anciens mortiers, on ne voyait certes pas la cible, mais on la savait là, derrière un pli de terrain ou une barrière végétale. Avec son tir en cloche, le mortier se jouait des difficultés de terrain. Quant aux bombardiers, vous avez certainement vu des images remontant à la Deuxième Guerre mondiale où leurs pilotes s’approchaient au plus près de leurs cibles, pour ouvrir leurs soutes et déverser leur cargaison mortelle.

Et l’ennemi s’éloigna

Pour de multiples raisons, on s’éloigna de son ennemi, sauf dans certaines situations, comme le combat urbain. On gâcha dès lors beaucoup de munitions pour atteindre son objectif… quand on l’atteignait, mais difficile de faire autrement sans technologie adaptée…

Aujourd’hui, parce qu’il est difficile de passer à côté des bulletins d’information sur la guerre en Ukraine, nous avons tous entendu parler d’une fierté de l’industrie française, le canon Caesar. Il est en effet capable d’envoyer ses obus à une quarantaine de kilomètres, voire plus selon le type de munition.

Passons sur les performances proprement dites du canon pour nous intéresser aux ‘‘projectiles’’ qu’il utilise. Certains emportent avec eux deux charges explosives pouvant toucher à l’arrivée, par exemple, deux chars éloignés de 150 mètres. Le plus innovant et étonnant pour un béotien est que cet obus est guidé.

Pour permettre cette trajectoire guidée, l’équipage du canon aura introduit la position de l’ennemi dans un calculateur balistique. Cette information peut également être transmise par un opérateur avancé, un de ces commandos capables d’approcher des cibles.

Le canon Caesar envoie ses obus par exemple en direction des chars blindés dont il faut arrêter la progression. Ces derniers sont mobiles et, disons-le simplement, n’attendent pas les obus de l’ennemi pour tester leur blindage. Aussi les charges explosives envoyées par le canon Caesar finissent leur trajectoire, guidées par des systèmes infrarouges qui repèrent la « trace thermique » des chars.

Électronique, induction, etc.

Délaissons les obus pour parler de roquette [1], une autre munition guidée, qui nous réserve nombre de surprises. En effet, vous entendrez — ou lirez — peut-être l’expression de roquette « activée par induction et guidée par laser ». Pas de panique, nous allons décortiquer cela…

Commençons par l’induction… Il n’y a pas si longtemps, les roquettes utilisaient pour leur lancement un système de mise à feu électrique. Le problème est que ce système est sensible aux perturbations électromagnétiques ou plus simplement électriques. Difficile donc d’en assurer un fonctionnement fiable avec, à proximité, des appareils électroniques (smartphones par exemple).

D’où le développement d’un système d’activation par induction évitant une mise à feu accidentelle et prévenant des risques liés à ce que l’on appelle la guerre électronique.


[1] À la différence d’un missile, une roquette est propulsée par un ‘‘moteur’’ dans la première partie de sa trajectoire avant d’achever celle-ci comme un obus. Le missile, quant à lui est propulsé sur tout son parcours.

… Et le laser ? Bon, notre roquette a été lancée. Lui a été transféré un certain nombre de données pour se diriger et c’est là qu’intervient un système de guidage par laser. D’une manière générale, celui-ci est constitué de deux parties distinctes, l’une interne à la munition — le capteur — et l’autre externe — le désignateur —. Celui-ci est un rayon laser projeté par un avion ou des forces terrestres (commandos) sur la cible.

Le faisceau laser crée une sorte de tache. Cette tache va émettre un signal qui lui est propre, de manière à être identifiée par un capteur et pas par un autre. Le capteur est installé sur la roquette et, comme nous venons de le voir, il ne réagira qu’au signal d’une seule tache.

Ces roquettes sont logées dans des lanceurs pouvant en accueillir plusieurs, chacune ayant un objectif.

LE GPS, mais pas que.

La conception des nouvelles générations de munitions doit obéir à la nécessité d’optimiser leur utilisation, qu’il s’agisse d’atteindre une cible, évidemment, et de la mobilisation d’autres acteurs nécessaires au marquage de l’objectif. Ces systèmes coûtent des petites fortunes et l’on ne peut imaginer les lancer un peu ‘‘au hasard’’. Aussi, les systèmes de navigation par satellite — le GPS américain ou le système européen, plus précis, Galileo — offrent la possibilité de telles économies dès lors qu’il est possible de localiser la longitude, la latitude et l’altitude de sa destination.

La société Nexter développe un obus doté d’un système de localisation et de guidage pouvant utiliser indifféremment le système européen (Galileo), l’américain (GPS) et le russe (GLONASS). Ce système intègre également l’outil permettant de pallier, par exemple, un brouillage de l’ennemi. On appelle cela une centrale inertielle. Retenez, pour faire simple, que c’est un moyen de navigation n’ayant besoin d’aucune donnée extérieure pour estimer sa position, son orientation et sa vitesse. Avec ces données et son ‘‘point d’arrivée’’, inutile de dire qu’il est possible de modifier une trajectoire, en cas de turbulence, par exemple.

Des industriels produisent donc des munitions équipées de GPS, mais reste ce qui est en stock !

Pour pouvoir ‘‘moderniser’’ ces stocks, un  » kit de précision guidée » a été conçu. Son acronyme anglo-saxon est PGK pour « Precision Guided Pack ». Nous avons donc là un moyen de transformer des munitions dites classiques en munitions guidées…

En guise conclusion,

Avec ces explications que j’ai voulues les plus simples possible, vous êtes en mesure de comprendre comment, et vers quoi, ont évolué nos munitions traditionnelles.

Dans mon introduction, je parlais également de cartouches, au sens de munitions des armes de poing. Il y a un peu moins d’une dizaine d’années, la presse spécialisée s’était faite l’écho d’évolutions allant jusqu’à parler de projectiles pouvant changer de trajectoire pour suivre leur cible (voir l’article de France 24 ici). Aujourd’hui, de tels projets semblent tomber dans l’oubli. Cela peut s’expliquer par des coûts très élevés. Et puis, dans le même temps, on voit se développer des systèmes de visée rendant intelligente, non pas la munition mais l’arme utilisée.Il s’agit d’un boitier qui activé par le tireur, va verrouiller la cible, puis corriger -via le viseur- la trajectoire de la munition.

Ce mot de munition se voit également affubler d’autres qualificatifs puisqu’on parle de munitions vagabondes, rôdeuses, ou encore de « tirées et oubliées ». Nous en reparlerons, car, à mon sens, elles s’apparentent à la famille des drones traités dans un prochain article.